« J’ai un secret.
Que vous soyez mousse, faucon, mycélium ou observateur solitaire de l’aube au bord d’une rivière, vous êtes une mère.
Et vous êtes materné.
Par la complexité galactique de votre intestin, par les saisons, les pollens et les pas qui aspirent la boue, par les aile jumelles de vos poumons, par le vent vert qui vient doucement border une boucle derrière votre oreille.
Votre corps vous materne.
Et comme un enfant, vous vous blottissez profondément dans d’autres corps.
Le corps des forêts, celui des spores, du climat aussi bleu et vaste qu’une toile.
Un homme peut materner sa propre mère.
Une petite fille sur la montagne materne le sommet, le lichen, fait traverser le sentier à une salamandre.
Une femme peut se materner tendrement en se faisant un café bien fort, en plaçant les tulipes dans le cercle jaune du soleil sur le rebord de la fenêtre.
Je sais que ta blessure est salée et qu’elle te pique.
Je sais que tu es en mal de berceuses, du souvenir d’un havre, sonore et naturel comme un nid d’hirondelle. Mais ici, laisse-moi te donner un cadeau grand comme le monde.
Un cadeau que tu me donnes aussi.
Chacun est une mère.
Chacun peut se tourner vers l’autre et lui offrir une chanson, un clin d’œil, une intense étreinte. »